Jonas DAHLBERG (1970 - )
film vidéo noir et blanc, muet
3'48'' (en boucle)
dim. projection : 4 x 3 m min.
Selected Solo
Exhibitions
2013
La Conservera, Murcia,
Spain
"Hall of Mirrors," Archizoom, Lausanne,
Switzerland
2012
Göteborgs Konsthall, Göteborg,
Sweden
2010
Galerie Nordenhake, Berlin
Tyskland
2009
Juana de Aizpuru, Madrid,
Spain
Galerie Nordenhake, Stockholm,
Sweden
“Think about death,” Korjamoo Gallery,
Helsinki
2008
“Three Rooms,” Galerie Nordenhake,
Stockholm, Sweden
Magazzino de Arte
Moderna
2007
Galeria Foksal, Warsaw
Poland
2006
PKM Gallery, Seoul
Konsthallen Bohuslans Museum, Uddevälla,
Sweden
Neue Kunsthalle St. Gallen. St Gallen
Switzerland (with Jan Mancuska)*
Frac Bourgogne, Dijon,
France
2005
Bonner Kunstverein. Bonn, Germany (with
Jan Mancuska)*
“Invisible Cities,” Moderna Museet,
Stockholm, Sweden
“The Horseman's Viewpoint,” Collège de Dornes Gallery, Dornes, France
(in tandem with FRAC Bourgogne, Dijon,
France)
Acte I:
le décor est un nocher...
1ère définition:
Far West
n.m. (mots angl. signif. “Ouest lointain”), nom donné aux Etats-Unis, pendant le XIXe s, aux territoires situés au-delà du Mississipi.
Plus loin à l’ouest, un espace inconnu, un horizon, un eldorado après le franchissement d’un fleuve… Terre d’espoirs et d’aventures… De haines et de passions, de tourments… Maelström d’émotions… Far West.
Janvier 1848 : un certain John Marshall « invente » de la lumière minérale du côté du couchant américain; un filon d’or émerge de la côte californienne… Sept mois plus tard, c’est la ruée… Une forme d’hystérie gagne l'Est, populaire pèlerinage ! Des hommes abandonnent tout et se lance à travers le continent… Des villes naissent sur tout le territoire, certaines survivent telle Virginia City, d’autres deviennent des villes fantômes quand les filons s’épuisent.
« Des lieux inhabités de fantômes », témoignage d’un passage. Mais aucun signe de vie, pas la moindre trace organique ne parsème l’œuvre de Jonas Dahlberg, une ville fantôme sans
aucun brin d’herbe, aucune feuille… Tout semble aseptisé… Sauf… Sauf peut-être cette pluie qui fait briller cette « one way street », cette voie à sens unique, pour la transformer en ce
lieu de passage mythique, ce fleuve qui mêlent l’Achéron (fleuve de l’Affliction) et le Cocyte (fleuve des Gémissements) décrit par Virgile, nous passagers impuissants et involontaires à bord de
la barque du nocher Charon qui progresse inéluctablement, infernal travelling, sans possibilité de rémission…
Nous ne sommes ici qu’ombres, âmes en peine, prisonniers d’une sorte de boucle infernale, nuit sans fin, pauvre Sisyphe sans le moindre fardeau à part celui de notre âme, dans son absolue solitude.
Déprime 1.
Acte II :
petite anecdote métaphysique
2ème définition :
N.D.E. (Near-Death Experience)
ou E.M.I (Expérience de Mort Imminente)
Personne ayant momentanément connu une mort physique… et en témoignant…
« Au cours des 30 dernières années, des témoignages de milliers de personnes de toutes nationalités, âges, religions, cultures, ont été recueillis par des professionnels de santé, psychologues, anthropologues ou autres. L'expérience, au sens de " vécu " et non d'expérimentation, est accessible aux autres seulement à travers le récit qui commence quasi-invariablement par " il n'y a pas de mots ". Cet " au-delà " des mots renvoie également, selon les témoins, à une " dimension " hors du temps et de l'espace (…) »,
d’après le journaliste Jocelyn Morisson.
Une des composantes générales de ces « visions » liées aux E.M.I. est le « déplacement dans un espace long, sombre, circulaire », avec tout au bout, là-bas, une lumière blanche…
Espoir.
Mais ici, pas de lumière… Un gouffre obscur, un vortex ou trou noir aspirant les vivants en transit.
Déprime 2.
Acte III :
Prison ou dédale ontologique.
3ème définition :
dédale
n.m. (de Dédale, architecte du Labyrinthe ou fut enfermé le Minotaure). Lieu formé d’un ensemble très compliqué de voies où l’on s’égare ; bâtiment dont l’issue est difficile à trouver
Ce lent travelling est infini, prend possession de notre regard. Nous sommes plongés dans une boucle, prisonniers d’une voie à un unique point de vue. Pas d’échappatoire possible. Nous continuons à avancer, tout droit, sans oser emprunter une voie perpendiculaire qui nous offre sans doute le même spectacle.
Une fois entré dans ce dédale ontologique, difficile de s’échapper en usant du célèbre stratagème d’Icare ou encore du fil d’Ariane.
Cette allée sans fin de Jonas Dahlberg évoque un aspect du travail en noir et blanc du graveur néerlandais Mauritz Cornelius Escher (1898-1972), qui à partir des années 1940 exploite les phénomènes d’optique afin de créer des perspectives improbables où le spectateur est plongé dans une inextricable prison des yeux, en figurant par exemple des escaliers qui semblent à la fois monter et descendre vers un même point (Relativité, 1968).
Prise de tête 1.
Acte IV :
Cité idéale
4ème définition :
perspective
n.f. (lat. médiév. perspectiva , de perspicere, voir à travers). Art, technique de la représentation en deux dimensions, sur une surface plane, des objets en trois dimensions tels qu’ils apparaissent vus à une certaine distance et dans une position donnée.
Petit retour en arrière… Travelling à rebours en somme. Période de l’après Moyen Age nommée Re-naissance, action de renaître, résurgence de l’art et des conceptions antiques dans un tout autre contexte, et nouvelle conception de l’urbanité.
Jetons UN œil sur cette cité idéale d’Urbino peinte vers 1470, peut-être par Alberti. Un tempietto au centre, entourée de hauts édifices figés dans une immobilité symétrique qui se reflètent sur un sol marbré.
Il s’agit donc d’une vue de l’esprit, lieu inhabité de fantômes. Quelques signes cependant témoignent d’une présence non visible, tel volet entrouvert, tel élément végétal entretenu ornant une fenêtre… Angoissant tout de même ce vide malgré la clarté du jour. Une angoisse proche de celle du peintre italien De Chirico.
Silence 1
Christophe Ravignot